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Retour au pays de l'or vert
Retour à ma terre de coeur. Considéré comme l'enfer vert par certain et comme un havre de paix pour d'autres, On l'adore ou on la subit. La guyane est assurément l'endroit le plus dépaysant que je connaisse et lorsqu'on fait le premier pas en guyane on sait déja que d'une manière ou d'une autre, on sera marqué à vie par cet endroit.

La première chose qui marque en arrivant en Guyane, c'est l'humidité. Il y a de l'eau partout. D'innombrables fleuves et rivières serpentent sur son territoire. L'humidité dégagé par la forêt et les averses tropicales imprègne tout. Et toute cette eau permet à la nature de prospérer comme nulle part ailleurs. Ici tout est vert, sauvage, la nature recouvre tout. En somme l'endroit parfait pour partir à l'aventure.

Un autre des aspects fascinant de la Guyane c'est sa faune. Riche à un point qui dépasse l'imagination. Des mammifères aux insectes en passant par les reptiles et les poissons la vie ici se cache sous chaque feuille, dans chaque arbre.Tomber sur un animal sauvage est toujours un grand moment. Et en Guyane on croise des animaux à peu près n'importe où même dans les endroits les plus inattendus. Mais attention, les animaux ne se laissent pas voir si facilement, il faut apprendre à écouter, à reconnaitre leurs cris, être patient, marcher lentement, sans faire de bruit, et toujours être à l'affût. Parfois on ne voit rien pendant une randonnée de 4h, et c'est arrivés sur le parking que l'on croise un groupe de singe. Chaque sortie, chaque promenade devient, grâce à cette omniprésence de vie sauvage, une aventure. Et c'est peut être ça qui caractérise le mieux la Guyane à mes yeux, la Guyane c'est l'aventure.

Bien sur quand on pense à l’Amazonie, on imagine la jungle. Ses arbres immenses, l'humidité, la chaleur, la profusion de vie. Le gigantisme de la forêt vous happe. Dans la forêt le rapport d'échelle est différent, on se sent petit, on à l'impression de faire partie d'un tout plus grand, plus fort, et c'est le cas. Certains disent que la forêt jugent de ceux qui sont dignes d'y vivre. Et lorsqu'on finit par l'être, elle offre ses trésors à qui sait rester attentif et observateur.

A force de chercher les singes et les mammifères on finirait presque par en oublier que même au sol, même minuscule, la vie prolifère. On tombe parfois sur un chemin crée par les fourmis, des grappes de champignons, des chenilles sous une feuille, un araignée cachée dans un trou, la vie est partout et de toutes tailles.

Comment parler de la Guyane sans parler de son histoire et de ses heures sombres? L'un des faits marquants de l'histoire moderne de la Guyane fût le bagne. Le bagne fût la raison pour laquelle on l'appela "l'enfer vert", ce fût probablement ce que la France fit de pire dans son histoire et les ruines plus ou moins bien conservées disséminées entre littoral et forêt sont là pour en témoigner.

Après leur arrivée à Saint Laurent du Maroni, les bagnards étaient séparés en groupes en fonction de leurs crimes. Certains étaient là pour des raisons insignifiantes, d'autres pour des crimes plus graves, et d'autres encore pour leurs inclinations politiques. Au bout de quelques mois ils étaient envoyés dans différents camps de travail. Main d'oeuvre gratuite de l'état et des gouverneurs locaux, les bagnards étaient utilisés pour toutes sortes de taches: couper du bois pour l'export, déboiser, construire des camps et des chemins de fer, chercher de l'or, travailler aux champs, servir d'homme à tout faire dans les maisons des gouverneurs, le tout avec des conditions de vie plus que précaires... en somme de l'esclavage moderne, sous couvert de justice.

La majorité des bagnards étaient envoyés en cellules collectives, ou il pouvaient être jusqu'à 70 entassés, enchainés à leur lit en bois ou en béton. Une seule latrine pour tous, où bien sur, se relever la nuit pour aller se soulager est impensable. Dans ces cellules règnent les petits insectes, les maladies, les mauvaises odeurs, les règlements de compte, la chaleur, l'humidité. On est loin d'une nuit dans un petit hotel confortable.

Se faire porter pâle pour se reposer tranquillement à l'hopital ? Sûrement pas. Entre l'humidité, le manque de moyen et de personnel qualifié, un voyage à l'hopital signifie souvent la mort ou l'amputation d'un membre. Qui sont malgrès la beauté du lieu, des sorts assez peu enviables.

La journée du bagnard se décompose donc ainsi: Réveil en cellule, toilette dans des lavoirs communs, travail toute la journée en plein soleil et retour en cellule. Le tout agrémenté d'une maigre ration. Et comme si cela ne suffisait pas, on instaure la loi du doublage. Les transportés (les bagnards) condamnés à moins de huit ans de travaux forcés doivent à leur libération demeurer sur place un temps équivalent à la durée de leur peine. Et s'ils veulent rentrer en métropole, payer eux même leur billet retour. Aller au bagne, c'est un aller simple.

Pour les prisonniers les plus difficiles, ceux qui avaient les peines les plus lourdes, le traitement était un peu différent. En effet ceux ci jugés dangereux pour les autres forçats, étaient enfermés dans des cellules individuelles d'environ deux mètres sur un mètre cinquante. Soit très peu d’espace. Pour couronner le tout le prisonnier était attaché à son lit de bois par un énorme anneaux de métal qui pesait sur sa jambe (histoire qu'en plus des conditions de sommeil précaires il y ait un peu d'une douleur lancinante tout au long de la nuit.). Certaines cellules individuelles avaient aussi la particularité de ne pas avoir de plafond, pour que le bagnard puisse être surveillé de jour comme de nuit. Mettant le bagnard à la merci des humeurs des gardiens, du soleil brulant de la saison sèche, des pluies torrentielles de la saison des pluies, des insectes... Bref, on flirte ici avec les limites de l'inhumain.

Pour certains autres bagnard, jugés dangereux politiquement pour le gouvernement colonial Français de l'époque, le traitement était encore quelque peu différent. Les prisonniers politiques sensibles étaient eux envoyés sur l'ile du Diable. Au delà de son nom, l'ile à quelques spécificités. Les rochers et les vagues rendent le débarquement et l'embarquement difficile, il n'y a qu'un dortoir et deux gardiens, aucun débarcadère, rendant tout contact avec l'extérieur impossible. Les vivres sont envoyés sur l'ile a l'aide d'un câble tendu entre l'ile Royale et l'ile du Diable. Seule une petite habitation que quelques mètre carrés est érigé au bord de l'eau, et à l'époque entouré d'un mur de plus de 3mètres de haut rendant difficile la communication entre le locataire de ce bâtiment et les autres forçat, et empêchant l'occupant de voir autre chose que sa propre geôle. Ce malheureux locataire, vous le connaissez, vous en avez entendu parler, il s'agit de Mr Alfred Dreyfus. Envoyé loin des yeux, du cœur et des pensées de la France, pourrir dans ce que l'on appelait alors l'enfer vert.

L'enfer vert, réaménagé par les bagnards donne aujourd'hui une impression différente d'alors. On marche sur des chemins fait à la sueur des forçats dans une nature luxuriante, difficile alors de se rendre compte de l'horreur qui a eu lieu en cet endroit. Difficile d'imaginer leur labeur, sous un soleil de plomb.

Souvent, un voyage au bagne signifie soit la mort, soit l'enfermement à vie. Il existe peu d'échappatoires. Pour survivre dans ce monde, il faut ruser, se faire discret, ne jamais entrer dans des bagarres ou des histoires avec d'autres bagnards, qui souvent peuvent être violents ou tenter de vous voler le peu que vous avez. Voler sous les radars, le temps de sa peine. Rares sont ceux qui en réchappent, les taux de mortalités dus aux maladies et aux conditions de vie sont très élevés. Nommées Iles du Salut après avoir sauvé les premiers colons y ayant trouvé refuge lorsque la fièvre jaune sévissait sur la côte, sous le contrôle de l'administration pénitentiaire les îles n'ont alors jamais aussi mal porté leur nom.

Ne vous y trompez pas, il ne s’agit pas ici d'un cimeterre pour les infortunés bagnard qui furent exécutés mais bien un cimeterre pour les gardien décédés sur l'ile. Comprenez bien, l'administration pénitentiaire ne va pas s’embêter à creuser des tombes pour des criminels qui ne le méritent pas alors que d'autres solutions plus pragmatiques existent. En effet, si l'on jette les corps à la mer autour de l'ile afin d'attirer les requins, on fait d'une pierre deux coups, on se débarrasse des corps simplement et on crée un obstacle de taille pour les fuyards.

Que reste-t-il aujourd'hui du bagne en Guyane ? Comme je vous l'ai dit, en Guyane, la nature reprend vite ses droits. Le camp de la Transportation à Saint Laurent est toujours entretenu, pour les iles du Salut c'est différent. L'ile du Diable est interdite d'accès, l'ile Royale est entretenue afin de rendre possible les visites, l'ile Saint Joseph quant à elle est laissée telle quelle, seul le chemin de ronde et le cimeterre sont entretenus. Les bagnes de foret quand à eux sont laissés à l'abandon. Ce qui reste finalement dans tous ces endroits, c'est une atmosphère. On sent que les lieux sont chargés d'une histoire tragique. On déambule dans les prisons abandonnées, on lit les noms des bagnards gravés dans les murs, on retient un peu son souffle en passant devant l'emplacement de la guillotine, on est surpris par les animaux ayant élu domicile dans les anciens baraquements, on s’extasie devant la nature qui reprend son territoire entre les murs de béton et on est forcement touché par une certaine mélancolie teinté de tristesse en imaginant tout ces pauvres gens envoyés vivre l'enfer dans un lieu aussi beau.

On ne peut qu'être admiratif quand à la beauté et la résilience de la nature en ces lieux. C'est un peu comme si elle avait repris possession des lieux, qu'elle avait refait la déco à son gout. Certains arbres on poussés dans les anciens couloirs, d'autres paraissent pousser en équilibre sur les murs et autres chemins de gardes. La mousse tapisse les murs de vert aux reflets parfois bleutés et laisse parfois apercevoir les diverses signatures et dessins laissés sur les murs par les bagnards. Les insectes ont eux pris la place des anciens occupants alors que les oiseaux ont remplacés les gardes. La vie à repris son court dans ces lieux, recouvrant petit à petit tout un pan de l'histoire franco-guyanaise.

Un autre partie de l'histoire oublié de Guyane est au moins tout aussi sombre que l'histoire du bagne. Plus méconnue parce que plus ancienne et moins visible, c'est l'histoire de l’esclavage. Aboli en 1848, il aura duré près de deux cents ans et tout le monde y aura participé: la France, l'église, les propriétaires particuliers... Malheureusement comme je l'ai dit, les vestiges sont moins visibles, le temps et la nature ayant englouti la quasi totalité des vestiges, un peu comme si la forêt voulait nous préserver des secret les plus sombre et les plus douloureux.

Une chose marante à faire en rentrant de Guyane, c'est d'aller faire un tour chez un fleuriste et de voir le prix des plantes que l'on à vu en abondance dans la forêt. La bas les orchidées et autres plantes épiphytes sont massés sur les arbres, elles poussent naturellement dans les jardins et jalonnent les balades en forêt.

Lorsque l'on se promène en forêt, on traine. On marche lentement, on s’arrête pour écouter les bruits, on cherche des traces, on regarde les plantes et les fleurs. C'est un endroit ou avoir la tête en l'air n'est plus un défaut mais une preuve de curiosité. On cherche les singes et les oiseaux multicolores, on rêve malgré la peur de croiser un félin, on cherche la présence camouflé d'un éventuel serpent ou d'une mygale, on tente de reconnaitre les bruit d'oiseaux pour mieux les trouver... Bref pour voir des animaux il faut comme le dirait Kryss (amie de la famille et guide de forêt): marcher en silence à 1km/h maximum avec les yeux qui se promènent.

On commence par regarder au sol, ne serait ce que pour voir ou l'on marche. Et déjà on commence à apercevoir les premières choses intéressantes. Parmi les innombrables racines se trouvent toutes sortes d'animaux. Des araignées dont certaines sont minuscules alors que d'autres peuvent être plus grosses qu'une main, des fourmis organisées qui défrichent une véritable voie au milieu de le foret, ou des grenouilles multicolores.

La variétés chez ces petits animaux est incroyable. Certains imitent la flore pour se camoufler, d'autres sautent pour s'enfuir, certains émettent des son étranges pour se démarquer, d'autres s'envolent dans un bourdonnement d'hélicoptère, alors que certaines plantes et certains animaux ont eux des odeurs reconnaissables. Chaque virée en foret devient fascinante et donne l'impression d'être un explorateur sur une terre nouvelle et inconnue.

Parfois en forêt on croise un morpho, véritable éclair bleu que l'on voit du coin de l’œil. Le morpho est rapide pour pouvoir survivre aux prédateurs, marron sous les ailes pour pouvoir se dissimuler lorsqu'il est posé et bleu fluo pour reconnaitre ses congénères. Il est très difficile d'en prendre un en photo dans la forêt tant ils virevoltent à toute vitesse. Même si le morpho est un des emblèmes de la Guyane, il n'est pour autant pas le seul représentant remarquable dans les espèces de papillons. Il en existe de toutes tailles, de toutes formes et de toutes les couleurs, du plus petit volant au raz du sol jusqu'au plus gros papillon de nuit au monde qui lui est aussi grand qu'un plat à tarte.

Certains jour on a la chance de croiser la route d'un mammifère, parfois en forêt, d’autres fois au bord de la route. Le plus souvent on voit des singes, plus broyant que les autres animaux. Ceux qui ont de la chance croiseront un félin ou deux, pour ma part la seule chose que j'ai vu d'un félin en forêt ce sont ses traces de pattes... Certain mammifères sont plus facile à approcher que d'autres, le paresseux par exemple peut tenter de vous fuir mais ne parviendra pas à vous distancer facilement. Et si la perspective de croiser un animal en forêt vous fait peur, dites vous juste que si vous n'êtes ni un danger si une proie, aucun animal ne s'attaquera à vous, la plupart du tout il vous observera un moment avant de continuer sa route.

Lorsque l'on marche en forêt on tombe parfois sur des zones ou poussent certaines plantes à fleurs. Les oiseaux de paradis, les roses de porcelaine, les passiflores, le roucou, le jasmin sauvage ou le cacao rivière sont autant de compagnons de voyages, véritables oasis de couleurs dans ce monochrome vert.

On retrouves certaines plantes d'appartement comme la Monstera ou autres plantes épiphytes, la seule différence ici c'est leur taille. Ici elles sont toutes bien plus grandes que celles que l'on trouve sur le vieux continent. Les feuilles de certaines de ces plantes ont la taille d'une table . Certaines paraissent duveteuse, d'autres ont un aspect brillant comme si on les avait polies. Certaines se distinguent par leurs couleurs plus foncées ou plus claires. Bref, la richesse de la flore ici n'a de cesse de surprendre.

Parfois on tombe sur les fleurs ou des plantes hors normes. Certaines fleurs peuvent atteindre une taille d'un bon mètre vingt, et surprenamment ne pas avoir d'odeur particulière, alors que d'autre a l'inverse peuvent être bien plus petites et dégager un parfum que l'on sent à des dizaines de mètres. Certaines de ces espèces se trouvent au sol, certaines plus en hauteur alors que d'autres sont encore plus en hauteur, invisible pour les marcheurs, cachées dans la canopée.

Certaines fleurs paraissent illuminées de l’intérieur. Avec leurs couleurs flashy elles sont un point de rencontre pour de nombreux insectes en quête de nourriture, mais aussi de colibri divers et variés en quête de leurs précieux nectar.

Les motifs et la texture de certaines plantes sont particulièrement surprenant. Certaines sont duveteuses, d'autres sont grasses, certaines sont colorées alors que d'autres sont sont translucides. Certaines sont "poilues" d'autres sont piquantes, certaines sont coupantes alors que d'autres se replient quand on les touches.

Les filles de l'air. C'est le surnom donné aux orchidées. Pourquoi la fille de l'air ? Parce que l'orchidée ne pousse pas dans la terre, elle pousse posé sur une branche. Attention, a la différence des plantes épiphytes elle ne sont que posés sur une branche et ne se nourrissent pas de l'arbre. Elles se nourrissent de l'eau qui tombe dans leurs feuilles et des petites poussières qui volent dans l'air. Elles vivent donc leurs vie sans empiéter sur l'espace des autres. Et bien sur en Guyane il en existe une multitude d’espèce, mais ça... vous vous en doutiez.

Bien sur, pour ne pas se perdre (et on se perd vite et rapidement), il faut rester sur les sentiers. Certains sont mieux balisés et plus fréquentés que d'autres, mais partout la nature reprend ses droits, le moindre escalier ou ponton en bois est rapidement recouvert de vert. On en perd l'impression de civilisation et très vite on se sent seul au milieu de nulle part, comme parti dans une expédition à l'autre bout du monde. Vous me direz, c'est peut être un peu le cas...

Il faut savoir que dans la forêt il fait assez sombre de manière générale (ce qui n'est pas pour faciliter la tache du photographe qui voudrait se risquer à capturer la beauté de cet endroit). Seuls quelques rayons de soleil traversent la canopée, à tel point qu'au moment ou arbre meurt ou tombe, démarre alors une course à l'arbre qui poussera le plus vite pour prendre sa place. Rares sont donc les endroit ou l'on peut voir ainsi le soleil pénétrer la forêt. La nuit tombe très vite lorsque l'on marche en forêt, mais pendant un court laps de temps les rayons orangés de soleil couchant arrivent à passer au travers des feuilles pour illuminer différemment la jungle, nous donnant l'impression d'être dans un lieu nouveau et magique, le temps de quelques minutes.

Les promenades en Guyane sont souvent ponctuées par la présence de rivières ou de fleuves qui serpentent son territoire. Alors forcement, un cour d'eau en forêt amazonienne, ça peut faire peur. On pense tout de suite "anaconda" "piranha"... et je ne vous mentirais pas en vous disant que tout cela n'est qu'un mythe, mais rien de tout cela ne vous empêchera de vous y baigner. La fraicheur de l'eau est une bénédiction dans la moiteur de la forêt, et les animaux auront plus peur de vous que vous d'eux.

Certaines des plus belles balades (comme la crique Gabriel (une crique est une rivière en Guyane)) ne se font qu'en bateau. Et quiconque connait un peu les lieux sait qu'il faut y venir pour la marée haute, lorsque la forêt est inondée, et ce pour deux raisons. La première: il est bien plus facile de naviguer lorsque la marée est haute, il y a plus de profondeur, et on peut passer avec le bateau au dessus des arbres et des branchages qui nous bloqueraient l'accès à marée basse. La deuxième raison est toute simple: c'est magnifique. On a l'impression de naviguer sur un miroir. On dirait presque que l'on vole au dessus de l'eau. Ca donne a la forêt un coté poétique, magique, presque mystique.

Au bout de la crique Gabriel se trouve le marais de Kaw (prononcez "Ko".). Un marais immense, presque la taille de Paris ou foisonne la vie animale. Le meilleur des endroit pour espérer voir des caïmans (les plus gros observés ici sont colossaux), toutes sortes de poissons aussi étonnant les uns que les autres, mais aussi une multitude d’espèces d'oiseaux.
C'est probablement un des plus beaux endroits pour observer un soleil couchant. C'est aussi l'heure ou l'on voit le plus d'oiseaux, ceux ci retournent à leurs nids pour y passer la nuit, ainsi il n'est pas rare de voir des groupe de perroquets, des toucans en pagaille, de grands hérons, des martins pécheurs ou toutes sortes d'autres espèces exotiques.

Pour prendre de la hauteur sur le plateau des Guyanes (Guyane, Surinam et Guyana) il faut nécessairement monter sur un Inselberg. En effet, le territoire est relativement plat et ne comporte aucun massif montagneux, ce qui est problématique si on veut avoir une vue dégagée sur la forêt. Les inselberg sont des formations rocheuses qui surplombent la forêt, à la manière d'un iceberg qui sortirait de la mer. Ces endroits sont assez rares, et pour les atteindre il faut s'enfoncer dans la jungle et autant vous dire que leur ascension combiné au chaud et à l'humidité de la forêt est un vrai chemin de croix.

Une chose à faire lorsque l'on monte sur un Inselberg c'est d'y aller pour le soleil couchant. C'est l'un des seuls endroits en forêt ou l'on peut admirer un coucher de soleil, et c'est au soleil couchant que la forêt est le plus active. Les animaux diurnes croisent les animaux nocturnes, les oiseaux qui rentrent chez eux croisent les chauves souris qui sortent chasser, l'orchestre des insectes nocturnes accompagne les ensembles de grenouilles et tous se croisent dans une symphonie animale impressionnante. La pièce de théâtre qui prend place sous nos yeux dans cet amphithéâtre de verdure nous fait ressentir la forêt plus intensément sous la lumière rougeoyante du crépuscule.

Ainsi entouré par le chant des Toucans et des Perroquets, on en oublierais presque qu'il faudra rentrer. Le chemin du retour se fait donc de nuit, à la lumière des lampes frontales. On avance presque à tâtons parmi les bruits étranges de la nuit dans la jungle. On se sentirait presque observé. Des petits points brillants s'illuminent à la lueur des lampes, autant d'yeux de petits insectes, d'araignées, de grenouilles et de crapauds. Parfois une chauve souris nous frôle, un oiseaux s'envole, une branche tombe, le concert des grenouilles s’arrêtent lorsque l'on s'approche d'elles... La forêt respire, elle vit, elle chante, elle nous parle, elle nous accompagne.

Certains endroits ne sont navigable qu'en canoë, la profondeur, les racines ou les débris d'arbres morts ne permettant pas à un bateau plus gros de passer. Ces retenues d'eau (souvent artificielles) sont des endroits oniriques, et y naviguer avec comme seul bruit celui des rames sur l'eau est un privilège. On y croise toutes sortes d’espèces, animales ou végétale. Il n'est pas rare d'y voir un colibri venu se nourrir dans la fleur d'une orchidée, un perroquet venu faire son nid près d'une plante épiphyte ou un vautour à l'affut d'une carcasse à nettoyer. On peut y pécher, et suivant l’appât utiliser, ramener d'énormes poissons chats, des petits piranha et si on a de la chance, peut être même croiser une loutre géante. Ici la vie et la mort s’entremêlent, et les restes d'arbres sortis de l'eau rendent l'endroit mélancolique, on en oublie tout le reste, les hommes, la course effrénée de la civilisation, on est au calme, au milieu de la nature, et si la nature n'était pas aussi vivante on pourrait même croire que le temps s'est arrêté.

A la pointe occidentale de la Guyane se trouve la petite ville de Saint Laurent. Allongée la au bord de la rivière, elle regarde sa sœur Surinamienne: Albina, allongée en face. Les allers retours incessants des pirogues donnent l'impression que les deux villes n'en sont en fait qu'une seule, séparées que par une rue ayant l'apparence d'une rivière. Partout dans la ville l'architecture et les ruines nous rappellent le passé bagnard et colonial alors que les gens, la langue, la culture, les pirogues et les épaves sont autant de preuves que nous sommes ici sur le territoire des peuples du fleuve.

Le temps s'écoule comme le fleuve, lentement, tranquillement, inexorablement. Les hommes passent comme les marées, les uns après les autres, ils s'installent et repartent, laissant par ci par là des traces de leurs passages. Les bateaux arrivent, s'amarrent, s'échouent, se font lentement dévorer par le fleuve, s'emplissent de vase et de terre, deviennent des ilots à la végétation grandissante auxquels s'amarrent d'autres embarcations, qui sombreront probablement à leur tour... Seul le fleuve reste, témoin silencieux du passage des hommes.

Ici les taxis et les camions n'ont pas besoin de roues car il n'y a pas de route. Les transporteur sont des aventuriers du fleuve qui vivent au gré de ses humeurs. On y croise toutes sortes de pirogues, contenant toutes sortes de chargements, du plus petit au plus surprenant. Ici on navigue entre français, créole, hollandais et autres langues du fleuve. Et alors que le grand poids lourd (Ghaan-pwalou) commence son voyage qui le mènera loin de la terre des hommes, c'est nous qui voyageons loin de notre époque impatiente, faite de normes, de règles et de sécurité. Pour naviguer sur ces eaux il faut de la patiente, de le sérénité, du calme. Il est inutile de vouloir apprivoiser le fleuve car il est indomptable, il faut donc se fondre en lui, le comprendre, l'écouter, vivre avec lui.

Parfois les bateaux en fin de vie s'offrent une deuxième jeunesse en se sédentarisant sur les berges du fleuve, sur une petite plage cachée au milieu de cet océan de verdure. L'occasion de manger un poisson du fleuve ou une viande locale dans un cadre original tout en profitant de la quiétude du fleuve à la fraicheur du crépuscule. On voit au loin les lumières d'Albina, l'autre moitié de Saint Laurent, on distingue le va et vient des pirogues dans la nuit. Parfois un poisson saute, les lumières sont tamisées et le rhum parfumé, c'est une autre bien belle façon de profiter de l'endroit.

Certains villages sont si reculés qu'ils ne sont accessibles qu'en bateau. C'est le cas de Kaw, petit village d'une vingtaine de maisons planté au milieu d'un marais gigantesque. Le village abritait autrefois un bar/restaurant/auberge maintenant fermé et ses rues en terre désertes lui donne une allure de village de Western. On déambule entre les maisons séparées par une flore luxuriante pour se dégourdir les jambes après un moment à explorer le marais en bateau. Le silence est uniquement coupé par les oiseaux qui passent en chantant, parfois un chien traverse la rue, on s'attendrait presque à voir rouler un buisson poussé par le vent ou un cowboy arriver à cheval.

Ici les vestiges d'une époque révolue nous entourent. Les bâtiments de l'époque coloniale regardent les hommes passer et les années s'écouler. Ils nous donnent l'impression de déambuler dans un période qui n'est pas la notre, comme si le temps s'était arrêté par endroits.

Certains bâtiments officiels sont directement hérité de l'époque coloniale, comme la sous préfecture de Cayenne. Accompagné de grands manguiers, de flamboyants et de palmiers, son architecture typique d'un autre age la différencie des bâtiments que l'on pourrait trouver sur le vieux continent. Le centre ville, constellé de ces bâtiments anciens et souvent colorés , nous donne l'impression de déambuler dans un musée à ciel ouvert, chaque bâtisse étant une fenêtre vers une autre époque.

C'est encore dans cette véritable cathédrale naturelle que je préfère flâner. Entre les colonnes et les arches boisées, sous un plafond feuillu. L'encens est remplacé par toutes sortes d'odeurs, ainsi le parfum sucré des mombins croisera l'odeur fétide du bois caca, l'odeur des cochons bois trahira leur présence et le parfum entêtant du jasmin sauvage nous accompagnera parmi les couloir sinueux de la forêt. Ici pas de vitraux, juste la vie qui se donne en spectacle, le bois cathédral avec ses racines imposantes côtoie l'ébène vert et ses feuilles jaunes pendant que d'épaisses lianes font les funambules entre les deux géants. La chorale des grenouilles et des insectes accompagne nos pérégrinations alors que l'oiseau sentinelle annoncera notre arrivée.
La nature nous offre ici son plus beau spectacle.

Guyane: l'enfer vert, pays de l'or finalement tu es le pays de l'Or Vert. Tu fascine par ta beauté, par ta richesse. Ta faune, ta flore, tes multiples cultures, ton mélange de langues et d'origines et ton patrimoine historique n'auront de cesse de m'émerveiller. Tout chez toi n'es qu'aventures et découvertes. Dans la forêt on se découvre soi même, au milieu de cette nature luxuriante on est face à nous même, on retourne à l'ordre naturel des choses, on est presque rien et pourtant on fait parti de ce grand tout.
Si vous ne l'avez pas compris ce reportage photo est une ode à cet endroit que j'aime tant. Et si à travers lui j'ai réussi à piquer votre curiosité à l'explorer, alors c'est que j'aurais réussi à communiquer un peu de ce qu'elle m'a donné. Certains de mes plus beaux souvenirs y prennent place, et je sais que d'une manière ou d'une autre j'y reviendrais. Cet endroit m'a vu grandir, je m'y sent chez moi. Parfois je me dis que même si tout venait à s'écrouler, je sais au fond de moi que quelque part, il y aura toujours la Guyane. C'est ma pépite, que j'emporte toujours avec moi. Guyane je t'aime d'un amour vert profond. Je ne pourrais jamais me résoudre a te dire adieu c'est pourquoi je terminerais en te disant: a bientôt.
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